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Le lancement officiel du projet de cantine scolaire pour l’année académique 24/25 a eu lieu à l’École Nationale République des États-Unis, à Bois-patate, Canapé-Vert, ce mardi 22 octobre. Financé par le gouvernement canadien et mis en œuvre par le Programme National de Cantines Scolaires (PNCS), cet événement a réuni plusieurs personnalités nationales et internationales. Cependant, les images de cette cérémonie, montrant des écoliers brandissant des petits drapeaux du Canada en échange d’un plat chaud, ont suscité un tollé sur les réseaux sociaux.
Port-au-Prince – 24 octobre 2024 : Le projet, présenté comme une initiative pour nourrir 100 000 élèves dans 400 écoles à travers Haïti, est perçu par de nombreux internautes comme une forme d’humiliation. L’image d’enfants haïtiens agitant des drapeaux canadiens pour recevoir de la nourriture a profondément choqué une partie de la population. Certains y voient une instrumentalisation des enfants pour servir l’image de la coopération canadienne.
Sur les réseaux sociaux, les critiques fusent. Mètrès Thòyart, une militante bien connue pour son engagement en faveur de l’agriculture et de la culture haïtienne, a exprimé son indignation : « Non AYITI pa chanje Drapo, se Mèsi n ap FOUT di pou ti plat manje » (Non, Haïti n’a pas changé son drapeau, nous ne faisons que dire merci pour un simple plat). Cette déclaration reflète un sentiment général de frustration face à ce que beaucoup considèrent comme une perte de dignité nationale.
La cérémonie s’est tenue en présence de nombreuses personnalités, dont le Ministre de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle, Antoine Augustin, la Directrice Régionale du Programme Alimentaire Mondial (PAM) pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Lola Castro, et la cheffe de mission de l’Ambassade du Canada en Haïti, Catherine Boucher. Djina Guillet Delatour, Coordonnatrice Générale du PNCS, a également pris part à l’événement.
Le programme de cantine scolaire, financé à hauteur de 45 millions de dollars canadiens, vise à fournir des repas chauds à 100 000 élèves durant cette année scolaire. Lors de son intervention, Antoine Augustin a souligné l’importance de ces repas pour améliorer les résultats scolaires et soutenir les enfants les plus vulnérables.
« Toutes les études réalisées, en ce sens, ont démontré que l’enfant qui va à l’école le matin et qui reçoit un plat chaud, est plus apte à apprendre et donner des résultats satisfaisants à l’école », a-t-il déclaré, tout en plaidant pour l’élargissement du programme aux enfants du préscolaire et du secondaire.
Lola Castro, Directrice Régionale du PAM, a quant à elle rappelé l’importance des cantines scolaires, notamment dans un contexte de crise alimentaire comme celui que traverse Haïti. « Un enfant qui a l’estomac vide ne peut pas absorber l’éducation », a-t-elle souligné. Elle a également vanté le fait que les repas distribués proviennent à 100 % de la production locale, un élément crucial dans le soutien à l’économie haïtienne.
Catherine Boucher, de l’Ambassade du Canada, a réitéré l’engagement de son pays envers l’éducation en Haïti. Selon elle, ce projet témoigne de la volonté du Canada de soutenir la rétention scolaire et d’améliorer la qualité de l’apprentissage. Cependant, ces déclarations, bien que louables, n’ont pas suffi à apaiser la colère des internautes, qui continuent de dénoncer ce qu’ils perçoivent comme une atteinte à la dignité des enfants haïtiens.
Des critiques qui persistent
Malgré les objectifs affichés par les autorités et les partenaires internationaux, le ressenti général sur les réseaux sociaux reste marqué par la déception et la colère. Beaucoup voient dans cette mise en scène des écoliers avec des drapeaux étrangers un symbole d’asservissement et de dépendance. Pour une partie de la population, cette initiative, qui devrait pourtant être célébrée pour son impact sur la sécurité alimentaire, est entachée par une symbolique jugée humiliante.
Alors que le projet de cantine scolaire poursuit son déploiement, les critiques sur la manière dont il est présenté ne faiblissent pas. L’image de la coopération internationale, en particulier celle du Canada, en ressort ternie aux yeux d’une frange de la population haïtienne qui attend une plus grande dignité dans la manière de traiter les enfants du pays.
RTMI