Savez-vous qu’il existe à Raboteau une tombe en mémoire d’Amiot Métayer, alias Kiben ?

Au cœur de Raboteau, quartier populaire des Gonaïves, se dresse une tombe singulière qui n’a rien d’ordinaire. Elle ne se trouve pas dans un cimetière, mais à l’intersection des rues Polpont et du Quai, au milieu de la vie quotidienne des habitants. Cette tombe abrite les restes d’Amiot Métayer, dit « Kiben », figure controversée et redoutée, chef de l’Armée Cannibale, assassiné le 21 septembre 2003. Sa mort provoqua aussitôt une vague de révolte contre le président Jean-Bertrand Aristide, marquant un tournant décisif dans l’histoire politique récente d’Haïti.

En octobre 2003, lors de ses funérailles, ses partisans refusèrent catégoriquement son inhumation au cimetière des Gonaïves. Pour eux, un tel geste aurait signifié une trahison de sa mémoire et de son rôle dans la lutte qu’ils considéraient comme une résistance. Ainsi, son corps fut enterré à Raboteau même, donnant naissance à une tombe qui devint rapidement un repère à la fois physique et symbolique.

Cette tombe dépasse aujourd’hui sa fonction première de sépulture. Elle est devenue un espace de mémoire collective, un lieu de rassemblement où se mêlent la douleur du passé, la fierté des luttes et l’énergie de la contestation. Dans un quartier souvent en marge, elle incarne une présence forte : celle d’un chef disparu mais encore invoqué. À chaque période de tension politique ou de mobilisation sociale, la population de Raboteau se réunit devant cette tombe. Avant toute marche, tout mouvement ou toute manifestation, des prières, des chants et même des rituels mystiques y sont célébrés, comme pour chercher force et protection.

Symbole de résistance pour certains, cicatrice pour d’autres, la tombe d’Amiot Métayer demeure un point de repère incontournable. Elle raconte l’histoire d’un quartier qui, malgré la pauvreté et les drames, continue de brandir la mémoire de son chef comme un cri contre l’oubli.

Feguerson Fegg THERMIDOR

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